Chroniques coup de coeur


5 nov. 2015

Le mec de la tombe d'à côté (♥♥♥) écrit par Katarina Mazetti - Éditions Actes Sud (Babel)

Titre: Le mec de la tombe d'à côté
Auteur: Katarina Mazetti
Genre: Contemporain
Nombre de pages: 256
Date de sortie: 30/03/2009
Prix support papier: 7€70
Prix format numérique: 7€49
ISBN: 978-2-7427-7190-5
Editions: Actes Sud (Babel)
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Synopsis:
Désirée se rend régulièrement sur la tombe de son mari, qui a eu le mauvais goût de mourir trop jeune. Bibliothécaire et citadine, elle vit dans un appartement tout blanc, très tendance, rempli de livres. Au cimetière, elle croise souvent le mec de la tombe d’à côté, dont l’apparence l’agace autant que le tape-à-l’oeil de la stèle qu’il fleurit assidûment. Depuis le décès de sa mère, Benny vit seul à la ferme familiale avec ses vingt-quatre vaches laitières. Il s’en sort comme il peut, avec son bon sens paysan et une sacrée dose d’autodérision. Chaque fois qu’il la rencontre, il est exaspéré par sa voisine de cimetière, son bonnet de feutre et son petit carnet de poésie.
Un jour pourtant, un sourire éclate simultanément sur leurs lèvres et ils en restent tous deux éblouis… C’est le début d’une passion dévorante. C’est avec un romantisme ébouriffant et un humour décapant que ce roman d’amour tendre et débridé pose la très sérieuse question du choc des cultures.


Mon avis:
Un bon roman que j'ai apprécié pour son originalité.
Katarina Mazetti m'a agréablement surprise !

Ma notation:

Vous l'avez lu ? Notez-le:

Informations:
Ce roman contient 54 chapitres

Mes ressentis:
J'ai découvert Katarina Mazetti il y a de cela quelques mois à travers son dernier roman Ma vie de pingouin, et jusqu'ici je gardais un mauvais souvenir des écrits de cette auteure. Ma lecture avait été pénible et fastidieuse et ne m'avait pas du tout plu. Si je n'avais pas eu dans ma bibliothèque, deux autres de ses romans (Le mec de la tombe d'à côté et Le caveau de famille), il est clair que je n'aurais pas retenté l'expérience et que je n'aurais pas lu un autre de ses livres.
Lorsque ma partenaire de blog m'a proposé de sortir de ma PàL Le mec de la tombe d'à côté et de le découvrir avec elle à l'occasion d'une lecture commune, j'ai accepté, sans grand enthousiasme c'est vrai, mais avec une petite pointe de curiosité pour cet ouvrage à la couverture bien sympathique, et puis c'était un bon moyen d'extraire définitivement ce livre de ma bibliothèque,
Finalement, ce fut une très bonne chose puisque j'ai dévoré en deux petits jours ce roman si différent de Ma vie de pingouin.

J'ai donc fait la connaissance de Désirée, une jeune bibliothécaire "toute beige", citadine et veuve qui se rend chaque jour au cimetière afin de se recueillir sur la tombe de son mari. Juste à côté de la sépulture du conjoint de Désirée se trouve une stèle très excentrique et très fleurie, d'ailleurs notre héroïne ne peut s’empêcher de l'observer du coin de l’œil, tout comme elle observe la personne qui met tant de cœur à entretenir cette tombe hors normes. Cet homme -Benny- vient lui aussi très régulièrement au cimetière.
Si au tout début de l'histoire Désirée et Benny ne s'aiment vraiment pas, très rapidement, ils passent au-dessus de leurs premières impressions et finissent par se trouver des points communs et des infinités.
Un roman drôle et farfelu, mais loin d'être aussi léger qu'il n'y paraît...

C'est une histoire d'amour atypique que nous découvrons à travers des personnages hauts en couleur. J'ai beaucoup aimé les divergences qui opposent Désirée et Benny : elle est citadine, lui est de la campagne. Elle aime son travail de bibliothécaire, il ne s'imagine pas vivre sans ses vaches (il est fermier). Ils ont tous deux des visions bien différentes de l'amour, de la vie de couple et familiale. C'est, dès le début, une histoire vouée à l'échec et pourtant, nous avons envie d'y croire.
Si j'ai apprécié Désirée, j'ai en revanche détesté Benny. Je n'aime pas du tout sa vision de la vie et son étroitesse d'esprit. Pour lui, la personne qui partagera son quotidien devra impérativement être une femme au foyer qui devra se lever à l'aube afin de s'occuper de la ferme, traire les vaches, entretenir sa maison et concocter des bons petits plats. Il veut absolument changer Désirée et faire en sorte qu'elle devienne son idéal féminin, mais la jeune femme a du caractère et n'est pas prête à se retrouver derrière les fourneaux, même par amour.

En bref, une chouette lecture ! Katarina Mazetti est remontée dans mon estime avec Le mec de la tombe d'à côté. J'ai directement enchaîné sur Le caveau de famille et n'ai pas été déçue par cette suite, même si certaines impressions que j'ai eues avec le premier tome se sont renforcées, mais bon, ça, je vous en parlerai en temps et en heure dans la chronique dédiée au second tome.
Un dernier conseil : Si comme moi, vous avez découvert Katarina Mazetti avec Ma vie de pingouin, alors laissez-lui une seconde chance et misez sur ses anciens romans qui sont incontestablement meilleurs.

Extrait:
1
 Qui prend le parti des morts ? 
Qui veille sur leurs droits 
écoute leurs problèmes 
et arrose leurs plantes vertes ?
 Méfiez-vous de moi ! Seule et déçue, je suis une femme dont la vie sentimentale n’est pas très orthodoxe, de toute évidence. Qui sait ce qui pourrait me passer par la tête à la prochaine lune ?
Vous avez quand même lu Stephen King ? Juste là, je suis devant la tombe de mon mari, assise sur un
banc de cimetière vert bouteille lustré par des générations de fesses, en train de me monter la tête contre sa dalle funéraire. C’est une petite pierre brute et sobre gravée seulement de son nom, Örjan Wallin, en caractères austères. Simple, presque à outrance, tout à son image. Et il l’a effectivement choisie lui-même, il avait laissé des indications dans son contrat obsèques souscrit chez Fonus.
 Il y a de quoi s’énerver. Je veux dire, il n’était même pas malade.
Je sais exactement ce qu’il veut dire avec sa pierre : la Mort est un Élément Parfaitement Naturel du Processus Vital. Il était biologiste.
 Je te remercie, Örjan.
 Je viens plusieurs fois par semaine pendant la pause de midi, et toujours au moins une fois le week-end. S’il se met à pleuvoir, je sors d’une toute petite pochette un imperméable en plastique. Je l’ai trouvé dans la commode de maman, il est parfaitement hideux.
 Nous sommes nombreux à avoir ce genre d’imperméable ici au cimetière.
 Je passe au moins une heure ici, à chaque fois, avant de m’en aller. Dans l’espoir sans doute de susciter un chagrin de circonstance, à force d’acharnement. On pourrait dire que je me sentirais beaucoup mieux si j’arrivais à me sentir moins bien, si j’étais capable de tordre les mouchoirs à la pelle ici sur mon banc, sans poser tout le temps ce regard en coin sur moi-même pour vérifier si mes larmes sont vraies.
La vérité, et elle est pénible, c’est que la moitié du temps je suis furieuse contre lui. Foutu lâcheur, tu aurais quand même pu faire plus attention avec ton vélo. Et le reste du temps, je ressens probablement la même chose qu’un enfant quand son vieux canari malade a fini par rendre l’âme. Oui, je l’avoue.
 Ce qui me manque, c’est sa compagnie indéfectible et la routine quotidienne. Plus de froissement de journal à côté de moi dans le canapé, ça ne sent jamais le café quand je rentre, l’étagère à chaussures est comme un arbre en hiver, dépouillée de tous les souliers et bottes d’Örjan.
 Si je ne trouve pas « Dieu soleil en deux lettres », il me faut deviner, ou passer à la définition suivante.
 L’autre moitié du lit double jamais défait.
Personne pour se demander pourquoi je ne rentre pas à la maison, si je venais à me faire écraser par une voiture.
 Et personne pour tirer la chasse d’eau à part moi.
 J’en suis donc là, à regretter le bruit de la chasse d’eau,
assise sur un banc de cimetière. Ça te va comme bizarrerie, Stephen ?
 C’est l’atmosphère des cimetières qui me fait tenir ce langage crispé d’humoriste de bas étage. Ça tient de l’autocensure, évidemment, et de la conjuration – mais qu’on me laisse au moins m’offrir cela. Ces petits rituels sont à peu près tout ce qui me reste pour passer le temps.
 Avec Örjan, c’était clair, je savais qui j’étais. Nous nous définissions, c’est bien à ça que servent les relations de couples, non ?
 Alors que maintenant, qui suis-je ?
 Une femme totalement livrée à ceux qui par hasard la voient. Pour les uns, je suis une électrice, pour les autres, piétonne, salariée, consommatrice de culture, capital humain ou propriétaire d’appartement.
 Ou alors seulement une synthèse de cheveux aux pointes fourchues, de tampons périodiques qui fuient et de peau sèche.
 Mais je peux évidemment continuer à utiliser Örjan pour m’identifier. Il peut bien me rendre ce service posthume. Sans lui, on aurait pu me qualifier de « nana solo, trente + », j’ai vu cette formule dans un magazine hier, j’en ai eu le poil hérissé. Alors qu’à présent je suis une « veuve encore jeune, sans enfants », quelle tragédie et quelle injustice ! Oui, vraiment, je te remercie, Örjan.
 Quelque part me taraude aussi un petit sentiment de pure déconfiture. Je suis tout simplement dépitée qu’Örjan soit allé mourir bêtement comme ça.
 Nous avions tout planifié, pour notre avenir proche comme pour le lointain ! Vacances en canoë kayak dans le Värmland et chacun sa confortable retraite complémentaire.
Örjan aussi devrait être dépité. Tout ce tai-chi, ces pommes de terre bio et ces acides gras polysaturés. Qu’est-ce que ça lui a rapporté en fin de compte ? se demande l’humoriste de bas étage en montrant ses incisives jaunes. Parfois je me mets carrément en rogne à sa place. Ce n’est pas juste, Örjan ! Toi qui voulais tant de bien, toi qui étais si compétent !
 Je ressens aussi parfois un léger frémissement impatient entre les jambes, après cinq mois de célibat. Ça me donne l’impression d’être nécrophile.
 À côté de la pierre tombale d’Örjan, il y a une stèle funéraire monstrueuse, oui, carrément vulgaire ! Marbre blanc avec calligraphie dorée, des angelots, des roses, des oiseaux, des guirlandes de devises et même une petite tête de mort vivifiante et une faux. La tombe elle-même est couverte de plantes, on dirait une pépinière. Il y a un nom masculin et un nom féminin avec des dates de naissance similaires, à coup sûr c’est un enfant qui honore ses parents de cette façon chargée.
 Il y a quelques semaines, j’ai vu pour la première fois la personne en deuil devant la stèle tape-à-l’œil. C’est un homme de mon âge avec un blouson voyant et une casquette doublée avec cache oreilles. La calotte est à l’américaine, plus haute devant, avec l’inscription Les Forestiers. Il était très occupé à biner et à nettoyer la plate-bande.
 Presque rien ne pousse autour de la pierre d’Örjan. Il aurait probablement trouvé un petit rosier totalement déplacé, l’espèce n’a pas sa place dans le biotope des cimetières. Et le fleuriste devant l’entrée du cimetière ne vend pas d’achillée ni de reine des prés.
 Le Forestier vient régulièrement à quelques jours d’intervalle, vers midi, toujours en trimballant de nouvelles plantes et des engrais. Il dégage cette fierté propre aux cultivateurs du dimanche, comme si la tombe était son jardin ouvrier.
La dernière fois, il s’est assis à côté de moi sur le banc et il m’a observée du coin de l’œil, mais sans rien dire.
 Il avait une drôle d’odeur et seulement trois doigts à la main gauche.

Parlons de l'auteur:
Katarina Mazetti a grandi à Karlskrona, port naval du sud de la Suède. Après des études de journalisme, elle débute dans des journaux locaux. Plus tard, elle reprend ses études et obtient une maîtrise de littérature et d’anglais à l’Université de Lund. Elle travaille comme professeur puis comme producteur et journaliste à la Radio suédoise. Elle vit pendant vingt ans avec son compagnon et ses quatre enfants dans une petite ferme du nord de la Suède avant de s'installer à Lund.
Elle a écrit des livres pour tous les âges, ainsi que des critiques littéraires, des chansons, des comédies et des chroniques pour des journaux et la radio. Son premier livre pour enfants était un livre d’images écrit en vers hexamètres classiques. Publié en 1999, son premier roman pour adultes, "Grabben i graven brevid" (en français, Le Mec de la tombe d'à côté) se base sur son expérience de femme de paysan. Vendu à 450 000 exemplaires en suédois, il est traduit en 22 langues et adapté au théâtre et au cinéma. En 2002, le film est un succès, vu par plus d’un million de Suédois.

Bibliographie:
♦Trucs et ficelles d'un petit troll → Editions Hachette jeunesse (2002)
♦Le Mec de la tombe d'à côté → Editions Gaïa (2006)
♦Entre Dieu et moi, c'est fini → Edition Gaïa (2007)
♦Les Larmes de Tarzan → Edition Gaïa (2007)
♦Entre le chaperon rouge et le loup, c'est fini → Edition Gaïa (2008)
♦La fin n'est que le début → Edition Gaïa (2009)
♦Le Caveau de famille → Edition Gaïa (2011)
♦Mon doudou divin → Edition Gaïa (2012)
♦Les cousins Karlsson → Editions Thierry Magnier (2013)
♦Le Viking qui voulait épouser la fille de soie → Edition Gaïa (2014)
Ma vie de pingouin → Edition Gaïa (2015) ← Ma chronique

Quelques liens indispensables:


2 commentaires:

  1. J'avais beaucoup apprécié cette lecture et sa suite. J'ai bien ri à chaque fois!

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  2. Moi aussi j'avais bien aimé mais il me semble que j'avais préféré le 1èr. J'attends de voir ce que tu en as pensé

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